L'encadrement du pouvoir de l'employeur en matière de fixation d'objectifs

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L'encadrement du pouvoir de l'employeur en matière de fixation d'objectifs

Un des éléments substantiels du contrat de travail est évidemment la rémunération.

Cette dernière se compose habituellement d’une partie fixe, mais peut également comporter une partie variable, dépendant d’objectifs à atteindre.

Si les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, comme l’a jugé la Chambre Sociale de la Cour de Cassation dans sa décision datée du 22 mai 2001 (pourvoi n° 99-41838), ce pouvoir est strictement encadré, et tout manquement de l’employeur peut entraîner des conséquences non négligeables.

En effet, lesdits objectifs doivent de prime abord être fixés en début d’exercice (I), mais également être réalistes et réalisables (II).

A défaut, le salarié peut légitimement prétendre aux commissions précédemment perçues sur la base des objectifs antérieurement fixés, et prendre acte de la rupture de son contrat de travail (III) (pour plus d’informations sur la prise d’acte : http://www.sarah-garandet-avocat.com/actualites/12-enfin-une-procedure-acceleree-et-simplifiee-pour-la-prise-d-acte)


I.La fixation des objectifs en début d’exercice

La jurisprudence constante considère que les objectifs doivent être assignés au salarié en début d’exercice (Cass. soc. 2 mars 2011 n° 08-44.977)

La Cour de Cassation a réaffirmé cette position le 2 Avril 2014 :

« Mais attendu que les objectifs définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, doivent être réalisables et portés à la connaissance du salarié en début d’exercice »(Cour de Cassation chambre sociale, 2 avril 2014, n° 12 – 29 381)

Ce courant jurisprudentiel est parfaitement logique et justifié par une réalité pratique : en effet, il est important pour un salarié de connaître les objectifs qu’il doit atteindre le plus tôt possible, afin de pouvoir s’organiser au mieux.

Cela évite également que l’employeur ne puisse fixer ses objectifs à l’aune des résultats déjà atteints afin de minimiser la rémunération finale du salarié.

Maître Sarah GARANDET a récemment obtenu gain de cause dans les intérêts d'un de ses clients par devant la 9èmeChambre B de la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, en faisant juger par cette dernière le 25 Mai 2018 que « l’absence de fixation d’objectifs pour l’année civile 2014 avant le mois de juillet de cette même année est fautive et dès lors, il n’y a pas lieu de discuter le bien fondé des objectifs commerciaux eux-mêmes ou leur expression en langue anglaise ».

En conséquence, la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE a, par cette décision, rappelé que le seul fait de ne pas fixer les objectifs du salarié en début d’exercice constitue une faute de la part de l’employeur.


II.La fixation d’objectifs réalistes et réalisables

D’autre part, les objectifs fixés par l’employeur doivent être réalisables, réalistes, et conformes au marché et aux moyens mis à disposition du salarié pour y parvenir (Cass. soc. 14 nov. 2000 n° 98-42371).

Là encore, cette jurisprudence tend à protéger le salarié en encadrant le pouvoir directionnel de l’employeur, qui ne peut impunément fixer des objectifs inatteignables afin de s’exonérer de l'acquittement de la partie variable de la rémunération du salarié.

L’appréciation des caractères réalistes et réalisables des objectifs est évidemment casuistique, et il conviendra d’en rapporter la preuve.

A titre d’exemple, une augmentation importante des objectifs à atteindre alors même que la famille de produits à vendre se voit restreinte, et/ou que la croissance du marché en question est fluctuante voire en baisse peut amener les juridictions à juger que les objectifs sont irréalisables. 


III.Sur les conséquences des manquements de l’employeur relatifs à la fixation des objectifs

En cas de manquement de l’employeur dans la fixation des objectifs du salarié (objectifs non fixés en début d’exercice ou irréalisables et irréalistes), deux conséquences cumulatives sont envisageables :

- De prime abord, la Haute Juridiction considère que la rémunération variable du salarié doit être intégralement payée par l’employeur.

Par application d'une jurisprudence bien assise, à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant des primes sur objectifs, il incombe au juge de le déterminer « en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes »(Cass. soc., 20 oct. 1998 : JurisData n° 1998-003919 ; Bull. civ. 1998, V, n° 436. – Cass. soc., 9 mai 2007 : JurisData n° 2007-038884 ; JCP S 2007, 1540. – Cass. soc., 13 juill. 2004 : JurisData n° 2004-024759 ; Bull. civ. 2004, V, n° 208).

Dans la droite lignée de cette jurisprudence, Maître Sarah GARANDET a obtenu, dans le cadre de la décision précitée rendue le 25 Mai 2018 par la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, la condamnation de l’employeur à une somme équivalente à celle versée au salarié l’année précédente au titre des commissions.

La Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE a alors rappelé que « en l’absence d’objectifs fixés au commencement de l’exercice, l’employeur qui était tenu de servir une part variable de la rémunération en application du contrat de travail sera condamné à verser une part équivalente à celle offerte l’année précédente ».


- En outre, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, dans une décision datée du 29 Juin 2011, n° 09-65710, a jugé que le défaut de fixation des objectifs du salarié constitue un manquement justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié, lorsque le contrat de travail prévoit que la rémunération variable dépend d'objectifs fixés annuellement par l'employeur.

C’est encore en ce sens que la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE a favorablement accueilli les demandes formulées par Maître Sarah GARANDET dans les intérêts de son client au sein de l’Arrêt rendu le 25 Mai 2018, en jugeant que « le fait d’attendre le mois de juillet pour fixer les objectifs de l’année civile constitue une faute qui cause, outre le préjudice évalué au point précédent à la somme de 36.168,73 euros, une désorganisation du travail du salarié pour qui la réalisation des objectifs commerciaux est essentielle sur le plan du développement professionnel.

Cette faute de l’employeur rendait ainsi impossible le maintien du lien contractuel est ainsi la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié s’analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ».

La Juridiction Aixoise a alors condamné l’employeur à payer au salarié, outre le rappel de commissions, l’indemnité légale de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour réparer le caractère vexatoire du licenciement, outre une somme au titre des frais irrépétibles d’appel.

Le Cabinet de Maître Sarah GARANDET se tient naturellement à votre disposition afin de vous apporter conseils et savoir-faire dans le cadre de tout litige afférent à la fixation des objectifs.



Adresse : 27 cours Saint Louis, 13100 Aix-en-Provence Téléphone : 04.13.91.05.92 Fax : 04.42.57.48.01 Email : sarah.garandet@gmail.com